Alternatives aux pesticides en Corse
Alternatives aux pesticides, l’Université de Corse, CNRS, fer de lance de la recherche. Dans le cadre d’un partenariat avec l’Areflec, l’Inter Bio Corse et l’Inra, l’Université de Corse et le CNRS ont mis sur pied un programme de recherche baptisé « Protect’Agrumes et autres productions végétales en Corse ». Son objectif : trouver des solutions biologiques alternatives aux pesticides pour la protection des cultures et en particulier la lutte contre les ravageurs. Explication en partenariat avec l’Université de Corse.
Le combat contre les pesticides est engagé à l’Université de Corse
À l’heure où les pesticides chimiques classiques font l’objet de controverses, des chercheurs de l’Université de Corse / CNRS (La- boratoire Sciences Pour l’Environnement) réunis au sein du projet structurant « Ressources Naturelles » orientent leurs travaux de recherche afin de proposer des alternatives à l’utilisation des produits phytosanitaires dans l’île.
Un projet de recherche innovant
Dans le cadre d’un partenariat avec l’Association de Recherche et d’Expérimentation sur les Fruits et Légumes de Corse (Areflec), l’Inter Bio Corse et l’Institut National de Recherche Agronomique (Inra) Sophia Agrobiotech de Nice, un programme scientifique commun a débuté en septembre 2018. Intitulé « Protect’Agrumes et autres productions végétales en Corse », ce projet de recherche innovant, financé par l’Office de Développement Agricole et Rural de la Corse (Odarc) et la Direction de l’Enseignement supérieur et de la Recherche de la Collectivité de Corse, résulte d’une demande de la filière agrumicole corse.
Trouver des alternatives biologiques pour protéger les cultures
Ces travaux visent à répondre à un enjeu aussi simple qu’ambitieux : trouver des alternatives biologiques pour protéger les cultures et lutter contre les ravageurs en uti- lisant notamment la ressource végétale.
« Cette démarche s’inscrit dans une vision résolument bioenvironnementale, explique Jean-Claude Ribaut, président de l’Areflec. En associant différents ac- teurs qui agissaient jusqu’à présent de façon cloisonnée, ces recherches doivent nous permettre d’être plus proches des réalités du terrain et d’évoluer vers un modèle d’agriculture durable ».
Ces travaux scientifiques ont pour ambition la mise au point de systèmes de production à bas intrants, en favorisant deux solutions de protection complémentaires
– les méthodes de lutte biologique utilisant des auxiliaires capables de combattre les nuisibles et les méthodes alternatives de lutte impliquant l’utilisation de système de phéromones
– l’utilisation de biostimulants et de biocides innovants issus de végétaux, capables de stimuler les processus naturels des plantes et lutter contre certains ravageurs ou maladies des cultures.
Des tests en grandeur nature
À titre d’exemple, des chercheurs de l’INRA de Sophia Agrobiotech de Nice, également partie prenante du projet, procèdent à l’élevage d’insectes spécifiques susceptibles de protéger les cultures sans utiliser de produits phytosanitaires. Pour la première fois conjointement, l’Université de Corse / CNRS, les professionnels et les acteurs de l’expérimentation et du développement agricole mènent ainsi des expérimentations et testent en grandeur nature des produits capables de doper la croissance de végétaux et de jouer un rôle d’herbicide et d’insecticide.
« Notre stratégie consiste à travailler sur des plantes présentes sur le territoire de la Corse pour trou- ver des actifs susceptibles d’être utilisés contre des nuisibles, développe Alain Muselli, professeur de Chimie au Laboratoire SPE de l’Université de Corse / CNRS, en charge du programme « Protect’Agrumes et autres productions végétales en Corse. À terme, notre objectif est de transférer les connaissances acquises et les innovations technologiques vers les agrumiculteurs et d’élargir cette démarche à d’autres filières afin d’accompagner les initiatives pour tendre vers une agriculture raisonnée ».
Une attente forte dans le monde agricole
Outre l’enjeu de limiter l’usage des pesticides chimiques pour la santé publique, l’attente est forte dans le monde agricole, notamment vis-à-vis d’un nouveau mode de gestion des ravageurs. Deux nuisibles sont d’ailleurs particulièrement ciblés par les travaux de ce programme pour les dommages qu’ils engendrent : la tapinoma (Tapinoma nigerrimum), petite fourmi noire locale, ainsi que la mineuse des agrumes (Phyllocnistis citrella), principal ravageur sur agrumes dont la larve s’attaque aux jeunes pousses des arbustes.
« La fourmi est un véritable fléau en Corse pour la culture des fruits et des légumes, précise Jean-Claude Ribaut. Dans les vergers et les plantations, les ravages sont énormes et il importe d’en minimiser l’impact ».
Sur l’ensemble de l’île quelque 500 agriculteurs sont aujourd’hui certifiés « bio »
De ce point de vue, les professionnels insulaires de l’agriculture attendent beaucoup du projet « Protect’Agrumes et autres productions végétales en Corse », surtout à l’heure où ceux-ci s’orientent davantage vers des modes de production biologiques. En effet, sur l’ensemble de l’île quelque 500 agriculteurs sont aujourd’hui certifiés « bio » et exploitent plus de 24 000 hectares, soit 14 % des surfaces agricoles de la Corse. Si seulement 18 % des exploitations insulaires œuvrent sur un modèle de production biologique à ce jour, l’Inter Bio Corse observe une progression des conversions biologiques de l’ordre de 15 à 20 % par an.
« Le fait de trouver des nouvelles molécules efficaces contre certains ravageurs va certainement renforcer cette dynamique et favoriser les conversions biolo- giques d’exploitations, estiment Emilie Claudet et Charline Landerieux, respectivement coordina- trice et chargée de projet pour l’Inter Bio Corse. « Par exemple, l’absence de solution pour certains nuisibles comme la mouche de l’olive freine actuellement le cheminement de la filière oléicole vers des démarches biologiques. De plus, si certaines cultures bénéficient déjà d’alternatives naturelles pour lutter contre les ravageurs, le programme Protect’Agrumes vise surtout à privilégier des solu- tions à base de plantes locales ».
Favoriser une forme d’autonomie insulaire en limitant l’importation de produits extérieurs
Un critère qui rejoint d’ailleurs l’un des enjeux de ce projet de recherche : favoriser une forme d’autonomie insulaire en limitant l’importation de produits extérieurs, pour privilégier l’usage des matières issues du territoire corse dans une démarche d’agriculture locale et durable.
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