Pierre Farel
Pierre Farel peint des toiles à la sensualité exacerbée. Il sculpte aussi, a collaboré à une marque de lunettes et aide les jeunes artistes de Corse à se faire connaître grâce à l’association Independ’arte. Originaire de Provence et résident corse depuis plusieurs décennies, il est une véritable célébrité aux multiples facettes reconnue dans le monde entier. On retrouvait d’ailleurs récemment certains de ses tableaux dans un épisode de la série américaine Esprits Criminels. Pari(s) sur la Corse est allé rencontrer l’artiste à La Cave les 24 & 25 juillet derniers à l’occasion d’une dédicace inédite des bouteilles de la cuvée Farel qu’il a dessiné pour le Clos du Mont Olivet (Côtes du Rhône).
Quel est ton lien avec la Corse ?
Mon lien le plus fort avec la Corse, c’est d’abord mon épouse. J’ai également des racines par mes ancêtres maternels qui sont corses. Ma mère est une Arène, qui vient d’une lignée du nom Arena.
Quand as-tu décidé de venir t’installer sur l’île ?
Je suis arrivé en Corse avec des amis en 1977, j’avais 20 ans et ne suis jamais reparti. Il faut dire qu’Ajaccio dans les années 77-80 c’était Ibiza, la vie nocturne était très importante, beaucoup plus qu’aujourd’hui, c’était une vie très agréable. Je suis tout de suite tombé amoureux de cette île et aujourd’hui, je ne peux plus m’en passer. Même si je voyage, j’expose beaucoup aux quatre coins du monde, mes racines pour moi restent la Corse, j’ai besoin d’y être. Mes amis sont ici, mes enfants sont nés ici aussi. Je m’y sens chez moi.
Parles-nous de ton parcours
Je suis issu des Beaux-Arts à Avignon. Quand je suis arrivée sur l’île, j’ai fait plusieurs petits jobs dans la décoration. C’était une autre époque, tout le monde trouvait du boulot. J’avais arrêté de peindre entre 20 et 30 ans, je m’y suis ensuite remis à fond et suis tout de suite devenu professionnel. J’ai d’abord travaillé avec La Galerie à Ajaccio, avant d’ouvrir plus tard ma propre galerie, l’espace Farel Créations.
De quelle manière la Corse inspire-t-elle ton travail ?
Par les paysages, bien sûr, mais pas que. Les couleurs également. Même lorsque je peins des scènes parisiennes, des scènes de bars, il y a toujours ces couleurs qui reviennent. Les gens comprennent que je suis un peintre méditerranéen. Ma peinture est liée à la fête, à la nuit, aux femmes, à la Dolce Vita… J’aime peindre des lieux que je retrouve ici, des restos des bars de plages, être témoin de cette vie-là.
Comment les gens perçoivent-ils la Corse à l’autre bout du monde, dans des villes comme Shangai par exemple ?
Souvent, ils ne savent pas vraiment où c’est. Mais si tu leur parles de Napoléon, là ils comprennent ! C’est une vraie figure de reconnaissance pour nous. D’ailleurs, je pense que le nouveau maire d’Ajaccio a compris ça et va faire en sorte de redévelopper l’image de Napoléon qui manque à la Corse. La Belgique fait des reconstitutions de batailles à Waterloo et nous ne sommes pas capable de le mettre en avant de notre côté. A part la maison Bonaparte, il n’y a pas grand-chose, alors que le trésor est là, chez nous. Il faudrait des croisières, un parcours, et le faire vivre toute l’année !
La Corse, un vivier de talents
Il y a des gens qui font des choses extraordinaires ici, j’ai toujours pensé qu’il fallait faire quelque chose pour les réunir, les mettre en contact. Par exemple, Christophe Mondoloni a fait tout l’hiver un spectacle à Paris sur Tino Rossi. Il a fait revivre le chanteur, j’ai vu des jeunes dans la salle au théâtre des Mathurins se lever, taper des mains, être emportés par l’ambiance ! C’était génial, une belle reconnaissance. Il y a tout un microcosme de talents sur l’île. Des gens dans l’art, dans le spectacle, qui font des choses super et sont connus dans le monde entier. Regarde le mannequin Gaëlle Pietri, qui est maintenant égérie pour l’Oréal, Jean-Claude et Angélique Nachon, des pointures dans le milieu de la musique de films français, Daniel Beretta qui est la voix française de Schwarzenegger depuis 25 ans, Pierre Nouveau-Zévaco le chef d’orchestre du Cirque d’Hiver, Jean-Jo et Christine di Fraja les créateurs de la marque Xacha, ou encore Garance Doré, elle aussi, c’est une sacré bloggeuse et elle vient de chez nous ! Et encore j’en passe !
Independ’arte, une association pour aider les jeunes artistes insulaires
J’ai créé cette association il y a une vingtaine d’années, dont Laurent Silvani s’occupe aujourd’hui. Notre but est d’accompagner les jeunes artistes, en leur permettant d’exposer à l’espace Santunione où nous organisons un événement deux fois par an. C’est un très bel endroit qui est également le lieu de prédilection de cette association. Je fais aussi partie du Jury du Prix artistique corse Jean-Leccia, organisé par Le Conseil départemental de la Haute-Corse et qui récompense chaque année une œuvre artistique originale. Ça me permet également de repérer les nouveaux talents sur le terrain.
C’est la première collaboration avec un vignoble ?
Non, c’est la troisième année. Au départ, j’étais hésitant, j’avais déjà collaboré à une marque de lunettes et à d’autres produits dérivés, j’ai eu peur que les gens disent que je faisais trop de choses. Et puis des amis artistes m’ont dit « nous, on aimerait bien faire des choses mais on ne nous demande jamais rien et toi, on te demande trop de choses et tu te plains ! ». Au final c’est vrai, et je ne fais rien sans qu’il y ait une réelle dimension artistique derrière. J’ai accepté et depuis on collabore ensemble. 2000 bouteilles ont été produites cette année, elles se vendent très bien, d’ailleurs on a déjà écoulé les magnums.
Comment choisis-tu tes projets ?
En fonction des rencontres. On m’a parfois demandé des choses folles je t’assure ! Je peux passer d’un extrême à l’autre. Par exemple, j’ai réalisé une immense Pietà pour une église en Corse où l’on a reproché à ma vierge d’être un peu trop dévêtue et parallèlement à ça, on retrouve certaines de mes œuvres dans des maisons closes de Genève et de Bruxelles. Ça m’est encore arrivé il n’y a pas longtemps, à la télé, je regardais l’interview d’une tenancière suisse et l’instant d’après j’aperçois mes toiles dans le fond de la pièce ! A côté de ça, je refuse aussi beaucoup de demandes, il faut avant tout que l’idée de base me plaise pour que je m’engage dans un projet.
Tes plans pour les mois à venir ?
Je fais toujours mon expo parisienne en décembre place des Vosges. J’y retrouve beaucoup de corses, je peux toujours compter sur le soutien de mes amis sur l’île, pour être présents. Parallèlement à ça, je travaille à d’autres projets liés à la Corse avec plusieurs amis. Mais ça, c’est encore confidentiel, je t’en dirai plus dans les mois qui viennent !
Crédits photos & mentions légales
© Pierre Farel © WFS © Editions Braun
Photographies des oeuvres : Erick Larrieu
Photographie d’accueil : Marianne Tessier
Conception graphique : Christophe Gimenez
En savoir plus :
Interview réalisée par Chloé Nury
Site internet : www.pierre-farel.com
Page Facebook : pierre farel
Page Facebook : Independ’arte