Restaurateur du patrimoine Corse
Depuis plusieurs années les élus et les personnes responsables des communes corses ont conscience de la nécessité de faire procéder à la restauration du patrimoine de l’île de beauté. Le temps, l’humidité, l’abandon sont néfastes à beaucoup d’oeuvres d’arts présentes dans les églises et dans les maisons de particuliers. Catherine Koening, une jeune femme installée à Belgodère, a ouvert un atelier de restauration. Miroirs, statuts, meubles…chaque objet a une histoire unique que cette ébéniste de formation tente de cerner avant de s’attaquer à un travail laborieux mais passionnant pour leur donner une seconde jeunesse. Rencontre sur la route des artisans de Balagne avec une artiste de la restauration.
Pouvez-vous vous présenter ?
Je m’appelle Catherine. Je suis installée à Belgodère depuis 5 ans comme ébéniste restaurateur et doreur. J’ai choisi la Balagne par attachement. J’y ai passé mon enfance et une partie de ma famille y vit à l’année. Je suis très attachée à cette région où de nombreux artisans y travaillent. C’est eux qui m’ont motivé à venir m’y installer et à vivre de ma passion.
Quelle est votre formation ?
Je me suis formée à Aix-en-Provence avant d’y travailler pendant 20 ans. Après un bac art plastique, je me suis orientée vers un CAP et un brevet professionnel en menuiserie et ébénisterie. J’ai poursuivi cette formation quelques années plus tard à Avignon en sculptures et peintures décoratives. J’ai ensuite intégré l’IRMACC : l’Institut Régional pour les Métiers d’Art et de la Création Contemporaine à Saint Etienne. Il s’agit d’une formation en alternance qui m’a permis de rencontrer et d’apprendre auprès d’un Maître doreur à Lyon.
Comment est née votre passion de la restauration ?
J’ai toujours aimé les vieux meubles et les vieux objets qui sont chargés d’histoire. Chaque meuble est unique. Avant de le travailler il faut passer du temps à l’étudier, à le toucher, à connaitre son histoire : Quelle est son époque, d’où vient-il, quel a été son montage, a t-il déjà subit une restauration ? Ce travail me permet de récolter des indices pour appliquer une restauration au plus juste !
Pourquoi êtes-vous venue travailler en Corse ?
Je me suis installée en Corse pour me rapprocher de ma famille qui vit en Balagne. Cette région est magnifique et j’ai de nombreux amis artisans qui m’ont conforté dans l’idée qu’il y avait une réelle demande pour mes compétences de restaurateur. J’ai franchi le pas et je suis venue m’installer à Belgodère. Depuis j’ai beaucoup de travail. Pour celui de dorure, par exemple, nous sommes que deux pour toute la Corse !
Quelles ont été vos 1ères réalisations ?
Depuis mon arrivée sur l’île, j’ai répondu à deux demandes de marché de la ville de Bastia : Le Palais Caraffa et le Musée de la ville. J’ai ainsi restauré le cadre de bois doré du portrait de Vincent Caraffa. Le cadre était tombé et s’était brisé en plusieurs morceaux. J’ai effectué un important travail de reconstitution et de sculpture. J’ai ensuite restauré des cadres pour le musée de la ville.
Etes-vous fière d’une restauration en particulier ?
Sans hésiter, le meuble de sacristie de la commune de Belgodere. Ça a été un travail très laborieux mais passionnant. Il a fallu le démonter pièce par pièce car la traverse centrale avait cédé. J’ai appliqué un traitement contre les xylophages, travaillé la sculpture pour les plinthes et fait un travail de recherche pour remplacer les boutons qui avaient disparu. J’ai changé les pièces les plus abimés et j’ai effectué un travail à la main à l’aide de racloir et de fer de tarabiscot. Un travail artisanal avec des techniques ancestrales pour m’adapter à l’âge du meuble qui a plus de 250 ans ! Il est composé de deux essences : noyer et buis pour les parties visibles et pin laricio et châtaignier pour le squelette.
Mon travail est varié et j’aime ça !
Je commence toujours plusieurs travaux en même temps. Le temps long de séchage me permet de prendre du recul sur un travail où d’en débuter un autre. Je ne vois pas le temps passer et j’adore ça !
Vous utilisez quels produits pour vos restaurations ?
Je travaille avec des colles animales comme la colle de poisson en ce qui concerne l’ébénisterie et la colle de peau pour la dorure. Je prépare mes propres vernis au tampon. Je fais mes bâtons de cires à boucher avec les pigments et la cire d’abeille. Je tiens ses techniques de mon professeur d’ébénisterie qui m’a transmis ses astuces.
Sur quoi travaillez-vous en ce moment ?
En ce moment j’ai un grand miroir Louis Philippe de plus de 2 mètres. Il appartient à un particulier. Le fronton est cassé et comme souvent il a été repeint. La cliente a conservé tous les morceaux et c’est à moi aujourd’hui de reconstituer le puzzle. J’effectue également un travail de moulage puisqu’il manque certaines pièces. Je travaille aussi sur un Christ polychrome datant du 19éme qui est mangé par les xylophages. J’ai un travail de sculpture dessus car il lui manque des doigts et les bras sont à refixer. Il appartient à une commune qui a fait appel à mes services. C’est un travail qui va me prendre plus de 2 mois !
Travaillez-vous avec d’autres artisans ?
Oui je travaille avec d’autres artisans autour de la création d’objets où j’ai le plaisir d’associer le bois et la terre, le verre et bientôt le bois et le cuir. C’est mon plaisir personnel. Nous créons. En ce moment par exemple, je travaille avec une potière Virginie Bareille « Atelier KINAI » à Cateri. On a créé un bougeoir, des lampes. Je travaille aussi avec Virginie Torrelli de « A tra-verre« . Elle travaille le verre à Calvi.
Les gens viennent-ils vous voir travailler dans votre atelier ?
L’atelier est situé en contre bas du village de Belgodère en direction d’Ile Rousse. Je suis à l’atelier tous les jours du lundi au vendredi. Je fais partie de la Route des Artisans de Balagne. Ça attire régulièrement des touristes qui viennent me voir. Je les reçois avec plaisir.
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Catherine Koenig
ART & BOIS
20226 Belgodère
Tel : 06 85 16 84 95